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Si loin que l’oiseau
Daniel BROCHARD, « poète maudit » d’aujourd’hui, s’est donné la mort le 22 janvier 2023. Catherine ANDRIEU, son amie de toujours, lui écrit, si loin que l’ait emmené son essor, ce recueil dédié à sa mémoire.
Si loin que l’oiseau, plus qu’un livre d’hommage, est un livre d’orages. Il rend la vérité d’une relation complexe entre deux êtres inadaptés et épris d’absolu – l’un comme l’autre failles affamées d’ailleurs, béances de l’esprit ouvertes aux grandes traverses déroutantes de l’imaginaire.
L’entrechoquement des sentiments contradictoires, le chaos émotionnel, est la loi de cette relation. L’amour et la haine, bien sûr (dès le premier poème, qui donne la note de tout le recueil, et dans lequel les calembours crachent leurs sarcasmes désespérés) – et leurs nuances : tendresse, tristesse, attentes et espérances, désespoirs, ironie cinglante, douceur des souvenirs, compréhension, incompréhension, inquiétude, impatiences, appels et supplications, sentiment de proximité, effroi de la perte, reproches, accusations…
Catherine ANDRIEU est un esprit particulièrement lucide – quant à autrui, et quant à soi. Si pourtant l’exaspère, et l’excède et l’égare, le chaos émotionnel, c’est sans la diviser : car sa conscience réflexive sait la réunir à elle-même, par un détour qui la recentre. Ainsi, dans son art, dans sa poésie – comme peut-être dans tout Art, toute Poésie qui franchit les portes de corne et d’ivoire –, le chaos se révèle-t-il régime transcendant de la lucidité.
Si loin que l’oiseau est une œuvre de haute vérité, poétique et humaine.
J.H. -
Les nouvelles lettres-poèmes de Marie
Le verbe poétique ici est métaphorique. Et lumineusement transparent. Avec des mots de tous les jours, le poète transporte son lecteur dans l’ailleurs d’une harmonie supérieure et d’un idéal accessible, où il fait bon vivre et habiter
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Demeure l’absent
En 1945, Joseph n’est pas revenu. Demeure l’absent témoigne de lui, de son absence, et de tous ceux qui ont voulu le retrouver. Ils ne l’ont pas oublié.
« Chaque fois que j’ouvre cette boîte, je suis prise du même découragement. Les lettres semblent ne jamais pouvoir être classées pour former un récit cohérent. Certaines ne sont pas datées. Parfois le tampon de la Poste s’est effacé. Certaines enveloppes sont vides et certaines lettres sont sans enveloppe. Les mots s’effacent, écrits à la mine. Le papier est piqué par endroits, tellement usé que des trous apparaissent dans le texte. Des passages ont été censurés. Il est impossible de
deviner ce qui est écrit sous le crayon noir, même en transparence. » -
Puis crac ! C’est la guerre
Entre 1914 et 1918, Jean Cailleau est sur le front. Son épouse, Pauline, l’attend à Denée en Anjou. Pendant tout ce temps, ils échangent plus de 1500 lettres !
Cet ouvrage est exceptionnel de par l’ampleur de l’échange épistolaire et ses témoignages rares des épreuves vécues par un couple angevin d’origine modeste que la guerre a séparé.
De la façon de gérer cette situation, de l’évolution de leur moral, de leur vision de la guerre, de la difficile éducation des enfants, de leur expérience de la violence, des épreuves matérielles – de leur vie quotidienne simplement – ils nous dévoilent tout ou presque de cette dure période qu’ils ont dû affronter… à l’unisson.Louis Thareaut, petit-fils des Cailleau, et Alain Jacobzone, historien, nous démontrent ainsi dans ce livre à deux voix que la mémoire et l’Histoire – l’hommage filial et l’analyse critique – peuvent faire bon ménage !
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Les lettres-poèmes de Marie
Une « correspondance », donc ? Mais le mot « correspondance » prend ici tout son sens de correspondance des âmes.
Comme l’observe Jean Chatard, l’un des destinataires et le Préfacier de ce recueil de Marie Desmaretz, chacune de ces lettres-poèmes « est un élan, élan d’une artiste pour ses nombreux amis ». Un élan, d’un même mouvement don et oubli de soi, qui permet à Marie de pénétrer « dans l’intime de chacun ». Serait-ce « indélicat » ? Non ! « C’est seulement tendre », corrige le Préfacier. Et parce que, dans ces lettres-poèmes, la tendresse se répand, « le lecteur se sent plus riche, plus tolérant, plus généreux »…
Heureux lecteur, convié par la douce Marie Desmaretz à partager la tendresse, lait et miel de la poésie, et de la vie !
J.H. -
La vie sans ailes
Quelle folie humaine, quel malheureux concours de circonstances l’avaient amenée là ?
C’est ce que découvrent ses deux sœurs à travers la correspondance échangée trente ans plus tard et les investigations d’un enquêteur recruté par leurs soins.
Le titre La vie sans ailes joue sur les mots ailes / elle et souligne le manque fondamental intevenant très tôt dans la vie de Beauvale, et qui en détermine le destin.